mardi 28 janvier 2014

- Let's go home -


Les premières fois sont excitantes, effrayantes, passionnantes. Parfois décevantes. Territoire inexploré, on se prend pour Christophe Colomb. Les caravelles en moins, peut-être. 

S’il est une première fois dont je ne me laisse jamais – aussi paradoxale que puisse paraître cette affirmation – c’est bien la découverte d’un nouveau lieu de vie. Les escaliers de votre peut-être futur appartement, la ligne de bus qui vous permettra de rentrer chez vous les six prochains mois, la boulangerie à l’angle qui vend les meilleurs pains au chocolat du quartier, le petit raccourci pour aller en cours que vous ne découvrirez que dans quelques semaines. Des lieux qui vont devenir familiers à force d’être fréquentés, mais qui ne sont pour le moment que des impressions, des sensations en bataille, des découvertes. 


From Bargarh Mor with love.


La route de Bargarh Mor est de ces lieux. De ces endroits qu’il faut avoir fréquenté quotidiennement pour en percevoir les détails. Quand je suis arrivée, bien trop blanche avec un sac à dos bien trop gros, je n’ai vu qu’un énième croisement à l’indienne. Deux routes poussiéreuses, quelques étals de fruit et des échoppes pour acheter du pan, un chai et trois samosas veg’. J’étais tellement submergée par ces nouvelles sensations, agrippée au siège derrière Alexis, qu’entretenir une conversation relevait de l’impossible. Je ne voyais qu’un plan large. Et flou. 

Et puis, à force d’emprunter la route pour prendre le bus d’Allahabad ou de Chitrakoot, à force d’aller à Paranubaba ou se rendre à Schankargard, j’ai enfin pu les voir, ces détails. Du lever au coucher du soleil, au petit matin ou en pleine nuit, les yeux rivés sur druethara,  assise derrière Ramesh ou écrasée entre Jen et Chotu pour ne pas avoir froid, dans le 4x4, en moto ou à rickshaw, j’ai appris à connaître la route de Bargarh Mor. La grande maison jaune à l’angle, le tas de brique qui me fait toujours penser à une grosse tortue, le champs inexplicablement parsemé de vieux essieux de moto, le passage à niveau qu’on ne doit respecter qu’en rickshaw, la station Indian Oil, le chemin ombragé qui mène à l’office des forêts, autant de balises sur cette route qui nous ramenait chez nous.

Depuis quelques jours, je découvre une nouvelle route. Qui passe par la pyramide du Louvres, l’Opéra Garnier et les avenues parisiennes. Une route qui me mène aux ascenseurs dorés des Galeries, avant de s’achever devant le poste 8732 et mes post-it colorés. Une nouvelle aventure qui s’annonce.